Moi aussi, j'ai une tétine de rat.
Je recevais ce soir à l'apéritif mon amie Yohanna, occasion de nous relater nos tribulations respectives intra et extra-hospitalières.
Yohanna remplaçait le Dr Habituelle, médecin généraliste très appréciée vu que la moitié des patients prévus ce jour-là ont reporté leur consultation en apprenant qu'il y avait une remplaçante...
La journée, aux allures de gruyère du fait des désistements à répétition, touchait presque à sa fin.
Alors que Yohanna se préparait à fermer boutique pour venir s'alcooliser à mon domicile, arriva inopinément au cabinet Mme Verrue.
Certes, cette dernière a bien soupiré comme tous les autres en voyant que le Dr Habituelle n'était pas là; mais a fait contre mauvaise fortune bon coeur.
En dehors du panel habituel de doléances chez les sexagénaires, à savoir les classiques jambes enflées/ tension artérielle en yo-yo/ douleurs possiblement arthrosiques de localisation indéterminée, elle avait une autre requête qui a des allures de collector.
"- J'ai une tétine de rat, Docteur. Vous pourriez vous en occuper?"
Non, on ne parle pas de mammelles de muridés. Chassez-donc cette image mentale.
La "tétine de rat" est l'appellation utilisée dans la région pour désigner le "molluscum pendulum"; excroissance charnue parfois inesthétique.
"- Euh... Je peux vous adresser à un dermatologue, éventuellement."
"- Mais non, ce n'est pas la peine voyons! Le Dr Habituelle prenait un fil qu'elle serrait autour, et ça tombait tout seul quelques jours après."
"- Ah. D'accord. Vous verrez avec le Dr Habituelle à son retour, dans ce cas; je ne pratique pas ce type d'actes."
"- Mais c'est facile! Ce n'est qu'un fil à serrer, c'est pas sorcier pourtant! Même vous, vous pouvez le faire!"
Et c'est ainsi que Yohanna a ajouté une nouvelle corde à son arc de compétences professionnelles, aujourd'hui: l'étranglement de tétine de rat. Ce n'est pas donné à tout le monde...